L’autre : altérité et identité
C’est le thème choisi par le Centre Culturel HÂ 32 pour son cycle de conférences annuel 2024, est un sujet particulièrement large et ambitieux, et le psychanalyste que je suis devenu ne pouvait rester indifférent à un tel choix, tant il est vrai que la matière psychanalytique dans sa globalité se trouve concernée par une telle étude. La psychanalyse en tant que domaine de réflexion de même que la cure psychanalytique elle-même, ne font en définitive que nous enseigner et nous replacer constamment dans notre relation à l’autre, cœur de la structuration du psychisme et du développement du Moi.
Nous n’aurions pas d’existence sans l’autre et notamment notre premier Autre, c’est-à-dire notre mère qui nous a inconsciemment transmis, par sa « capacité de rêverie » (fonction alpha maternelle) ce que l’on appelle la relation d’objet, donc le lien à l’autre, qui est tantôt frustrant, tantôt gratifiant, que nous continuons à porter en nous, et qui fait de nous les adultes que nous sommes, avec notre sensibilité, et notre plus ou moins grande capacité à aller vers autrui.
Car l’autre est avant tout notre inconscient projeté sur l’objet aimé ou haï, et ce que l’on dit ou croit de l’autre, ce qu’on fantasme de l’autre, n’est que la révélation de nos désirs cachés ou de notre manque à vivre.
Mais ce grand et beau thème ne saurait être seulement circonscrit au domaine de la psychanalyse. Il est aussi d’une actualité brûlante lorsqu’il pose la question de l’immigration et de l’exil, (l’autre en sa qualité d’étranger), lorsqu’on évoque la sexualité (l’identité, le genre, l’altérité), ou tout simplement lorsque nous tendons la main à cet autre que la Bible appelle notre prochain.
Ce sera donc l’occasion de questionner une société qui nous enferme souvent dans nos égoïsmes, nos deuils et nos solitudes, lorsque l’on considère l’autre comme un adversaire sans réaliser ce qu’il peut nous apporter de précieux et de nouveau dans l’évolution de nos vies. Il y a fort à croire que nous devrions nous enrichir en humanité tout au long des interventions de ce cycle et que notre sensibilité personnelle ne pourra qu’en être renforcée.
Jean-François BODET
Psychanalyste à Bordeaux,
Membre du CA du Centre culturel Hâ32